CADEAU premier chapitre de Loin des yeux, loin du coeur, l'histoire de Levi Owen
CADEAU
Je suis heureuse de vous offrir les premières pages de ma nouvelle, loin des yeux, loin du cœur, l’histoire de Levi Owen.

Loin des yeux, loin du cœur
L’histoire de Levi Owen
Adèle.K
Prologue
Je me présente, Levi Owen, originaire de Floride, 35 ans, acteur de cinéma depuis mes 20 ans où j’enchaine des rôles par-ci, par-là. Trois ans auparavant j’ai enfin décroché le personnage principal de la série « le sphinx » diffusée chaque lundi soir sur une chaine privée américaine. Pour obtenir ce rôle, prendre soin de moi et me façonner un corps agréable à regarder a été nécessaire. Chaque jour, j’ai soulevé de la fonte à la salle de musculation, dévoré quotidiennement une dizaine de repas protéinés afin de prendre en muscle. Un entrainement assidu et des menus adaptés m’ont permis de gagner dix kilos de forces en un an. Je ne vais pas vous mentir et en toute modestie, ma gueule est plaisante à mater. Un visage longiligne, une mâchoire carrée fournie d’une barbe taillée qui me mange les joues, un nez droit, des yeux couleur ambre en forme d’amande et écartés, des paupières hautes et des sourcils bien dessinés. Mes cheveux sont blond foncé, mi-longs, ondulés et dégradés sur le côté. Je pense que ma gueule d’ange et mon corps tout en muscles ont fait pencher la balance en ma faveur.
Je ne vous raconte pas ma joie lorsque la production m’a contacté pour m’avertir que le rôle principal me revenait. J’étais l’acteur le plus heureux à ce moment-là, et je le suis encore. J’adore travailler sur cette série qui ne devait compter au départ que deux saisons, mais au vu de l’engouement des téléspectateurs, nous en avons signé une troisième qui est actuellement en tournage à New York. Quand je dis nous, ce sont les comédiens.
On me retrouve dans le rôle de Mathias Power alias Mat pour les intimes. J’interprète un gosse de riche condamné pour un vol à main armée et renié par sa famille, trop honteuse d’avoir un gamin incarcéré. Ses parents ont préféré l’abandonner et le laisser croupir en prison. Seule son avocate, Quinn Barnes, joué par Bethany Snow, lui rend visite. C’est une jeune actrice de vingt-cinq ans, très douée dans le métier, et je n’ai aucun doute sur le fait qu’elle fera une très grande carrière. Je ne vais pas vous raconter la série en détail sinon ça gâcherait votre intérêt, mais vraiment, je vous conseille fortement de la regarder, vous ne serez pas déçus.
Du côté de ma vie personnelle, marié à Blake Grey depuis cinq ans, oui j’avoue que ses parents ne se sont pas foulés, mais je vous assure, elle ne voit pas l’existence en noir et gris. Quoique parfois, je me pose la question. Non, je plaisante. Bon, vous l’aurez compris, mesdames, je ne suis plus un cœur à prendre. J’ai rencontré Blake lors de la soirée d’anniversaire qu’organisait mon meilleur ami David pour célébrer son passage à la trentaine. David, je l’ai croisé sur une série dans laquelle j’avais décroché un petit rôle d’agent de police. Nous étions les deux plus jeunes acteurs, débutants et un peu perdus, avouons-le. David a un an de plus que moi et à ce jour, il n’est toujours pas marié. Il aime trop sa vie de célibataire.
Avec Blake, nous avons une petite fille Jordyn, qui est âgée de 2 ans, mignonne comme un cœur, elle fait notre bonheur. Jordyn ressemble à sa mère. Elle a hérité de la teinte brune de ses cheveux, de son visage rond, de ses fossettes, mais pas de ses grandes mirettes bleu marine. Jordyn et moi n’avons en commun que la couleur de nos yeux, ambre.
En apparence, mon existence semble parfaite. J’ai un métier qui me passionne, une femme qui m’aime et me soutient dans mon travail. Avec tout ça, je devrais être heureux, mais depuis le début du tournage de cette troisième saison, j’ai l’impression de ne plus contrôler ma vie, tout m’échappe.
Chapitre 01
Je suis éreinté, la soirée s’est éternisée. J’ai hâte de rentrer pour me coucher. Je salue l’équipe de tournage en leur souhaitant une bonne nuit avant de regagner mon véhicule, le modèle 3 de chez Tesla que j’adore conduire. Je migre vers les caravanes des acteurs. Celle de Bethany est encore éclairée, je m’approche et frappe à la porte qu’elle ouvre, surprise.
— Levi ? Tu as besoin de quelque chose ?
Je lui souris. Un de ces rictus réservés à elle seule. Bethany est une débutante dans le métier, mais elle m’a plus d’une fois ébloui durant nos premières scènes et depuis elle ne cesse de m’étonner.
— Je voulais juste te souhaiter une douce nuit. À demain, Bethany.
— C’est gentil de passer me voir. Bonne nuit à toi aussi, Levi. À demain. Dors bien.
Elle m’offre un sourire, mon préféré. Celui qui atteint ses grands yeux bleu pervenche tirant sur le parme. Des iris remarquables et originaux. J’ai déjà croisé des tas de personnes aux regards bleutés dans mon métier, mais jamais je ne suis tombé sur une telle couleur. Bethany est dotée d’une chevelure blond vénitien, bouclée, coupée en un carré plongeant sur le devant. Son nez en forme de trompette lui donne un petit air malicieux, ses lèvres qui représentent les prémices d’un cœur nous invitent à y poser les nôtres.
Bethany Snow prend soin d’elle, elle cumule les séances de yoga et raffermit son corps à la salle, deux à trois fois par semaine. De temps en temps, on s’entraine ensemble. Son travail acharné lui a sculpté un ventre plat et des fesses rebondies dignes d’une publicité pour lingerie. Le sourire toujours aux lèvres, elle me fixe et d’un petit signe de la main me renvoie, avant de refermer la porte. J’opère un demi-tour et me dirige vers le parking, chantant joyeusement comme un idiot.
Quinze minutes de trajet plus tard, j’arrive chez moi. Je lève les yeux sur la façade de l’immeuble et remarque que les lumières du salon de mon appartement sont encore allumées. J’aurais préféré que Blake dorme pour éviter une nouvelle dispute. Ces derniers temps, c’est récurrent. À peine ai-je mis un pied dans le logement, que ma femme me rejoint et vient m’étreindre avant de passer à l’interrogatoire.
— Ça a été au travail ? Tu as tourné beaucoup de scènes avec Bethany ?
Les séquences avec Bethany… c’est tout ce qui l’intéresse, savoir si j’ai filmé avec elle, si j’ai dû l’embrasser, la toucher, ou simplement lui parler. Blake déteste Bethany depuis un moment maintenant. Tout a commencé à cause de l’alchimie que nous dégageons à l’écran. L’engouement des fans face au couple que nous formons n’a pas aidé Blake à mieux l’apprécier.
— Oui, et pour les scènes avec Bethany, on en a tourné quelques-unes.
— Des baisers ?
— Blake, c’est quoi ces questions ? Non, pas d’embrassade, ajouté-je avec lassitude.
J’ai essayé de la rassurer plusieurs fois, mais rien n’y fait. Sa jalousie ressort constamment, pourtant, je ne lui ai jamais donné de raison de l’être. Bethany est une collègue de travail avec qui je m’entends bien, rien de plus.
Blake me regarde avant de passer ses mains autour de ma taille pour m’enlacer. Je m’efforce de l’étreindre en retour, sentant son besoin d’être réconfortée. Elle recule après un court instant et j’en profite pour la contourner. Je retire ma veste que je pose sur le dossier du canapé et file embrasser Jordyn, ma fille qui dort profondément dans sa chambre. Je l’admire un petit moment et finis par regagner le salon où Blake m’attend. Je m’assois à ses côtés et elle vient se pelotonner contre moi.
Je presse un baiser contre ses cheveux et sors mon téléphone. Je passe le temps sur les réseaux sociaux. Facebook, Twitter où je poste quelques messages divertissants à l’attention de mes fans. Puis j’ouvre Instagram. La première photo qui s’imprime à l’écran appartient au nouveau post de Bethany. Elle pose avec son groupe d’amis, installés à un bar. Je souris comme un imbécile en la découvrant si détendue et heureuse. Sa vie ne connait aucune monotonie et semble plus amusante que la mienne ces derniers temps.
— Tu as vu quelque chose qui t’a déplu ? Tu n’as pas l’air tranquille, m’interroge Blake qui se redresse et me sonde de son regard inquisiteur.
— Si ça va, je suis juste fatigué. Je vais me coucher.
Je me lève et Blake me suit. J’aurais préféré qu’elle reste au salon et me laisse souffler. Son film n’étant pas terminé, je pensais qu’elle aurait attendu la fin. Je suis vraiment crevé, mes scènes de combats qui sont les plus épuisantes, m’ont achevé. Je tiens toujours à effectuer les cascades, léguant les plus dangereuses à ma doublure. Je lui souhaite une bonne nuit d’un bref baiser sur les lèvres, ne voulant pas lui donner l’espoir qu’il pourrait y avoir plus, je me tourne vivement sur le côté, dos à elle. Après un soupir, elle pivote à son tour et se positionne de la même façon. Depuis quelque temps, c’est ainsi que nous nous couchons.
C’est tardivement que je me réveille le lendemain, bien détendu. Cette nuit m’a revigoré, de même que cette grasse matinée. Je sors de la salle de bains et me dirige dans la cuisine. Ma fille est assise dans sa chaise, dégustant de ses doigts, son repas. Ma femme, les yeux plongés sur l’écran d’ordinateur, tape sur le clavier à un rythme soutenu. Elle peaufine probablement son nouveau roman qui devrait paraitre dans toutes les librairies dans moins de deux mois. Je m’approche de Jordyn que j’embrasse sur le sommet du crâne, puis l’aide avec sa nourriture. J’adore passer des moments avec ma fille, elle est ma bouée de sauvetage depuis quelque temps. En sa présence, j’oublie tous mes soucis, tout ce qui m’entoure.
Blake qui a entendu les cris de plaisir de Jordyn, cesse son travail et vient nous interrompre dans notre instant de câlins et de jeux. Elle s’installe à mes côtés et attire l’attention de Jordyn. Sans me regarder, souriant à notre princesse, elle m’annonce :
— Levi, je ne te l’ai pas dit hier, mais je comptais partir à Los Angeles dans l’après-midi. Je peux prendre un vol à 17 h 30.
— Je peux savoir pourquoi tu pars ? Ne puis-je m’empêcher de lui demander.
— Tu sais que je déteste rester à New York, il fait froid et le climat n’est pas sain pour notre fille. Là-bas, il fait plus chaud et je préfère qu’elle grandisse à Los Angeles. Tu nous rejoindras ce week-end.
— Mais moi, Blake, je vis ici et notre fille a besoin de son père. Nous sommes une famille, bon sang.
— Tu es là ? Quand exactement ? Le soir ? Jordyn dort quand tu rentres. Le matin ? Tu es tellement fatigué que tu te réveilles avant-midi. Ensuite, tu t’entraines deux heures à la salle pour rester en forme. Alors Levi, dis-moi, quand passes-tu du temps avec Jordyn ?
— Dès que mon agenda me le permet, Blake. Comme maintenant. Excuse-moi d’avoir un métier si prenant.
— Écoute Levi… je sais tous les sacrifices que ton métier implique, d’accord. Mais, mets-toi à ma place un peu. Je suis isolée ici à longueur de journée. Mes amies résident toutes à LA, je ne converse qu’avec Jordyn. Tu penses que je m’éclate, que cette vie m’amuse ? J’ai besoin de contact avec des personnes de mon âge si je ne veux pas devenir folle.
— Je comprends ton désir de sortir, de voir du monde, je ne t’empêche pas d’aller t’éclater avec tes copines. Seulement, tu pourrais te rendre à Los Angeles le week-end ou deux jours, pas t’éloigner des semaines entières.
— Je pourrais Levi, mais je n’en ai pas envie. Comme je te l’ai dit, New York n’est pas une ville dans laquelle j’aspire à rester. Ma décision est prise, je rentre à Los Angeles pour une durée indéterminée.
— Ce week-end, je participe à une convention… si tu pars ce soir, je ne sais pas quand nous nous retrouverons.
— Levi, le lundi tu es en repos… nous nous verrons ce jour-là.
Pour les ignorants, je vous explique en quoi consistent ces conventions. C’est une manifestation organisée par des entreprises qui traitent de l’événementiel. Ses sociétés convient plusieurs artistes et les fans peuvent, moyennant finances, les accoster, obtenir un autographe ou des photos avec l’acteur. C’est assez varié, mais je ne vais pas mentir, ça a un prix de voir en chair et en os son idole. Je participe à un maximum de ces occasions et ne refuse jamais une invitation. J’aime aller à la rencontre de mon public, et je ne vais pas le nier, une journée comme celle-là me rapporte également beaucoup d’argent.
Blake retourne à son roman et moi, j’attrape mon petit rayon de soleil que j’emmène dans sa chambre pour partager un moment rien que tous les deux avant son départ. Je ne comprends pas pourquoi Blake se barre aussi souvent. La première année où j’ai tourné sur, « le sphinx », elle était toujours collée à moi et m’accompagnait même sur le plateau. Ma femme s’entendait bien avec tout le monde, y compris Bethany. Malheureusement pour moi, cette époque semble révolue, plus les mois s’écoulent et plus Blake s’éloigne. J’ai essayé d’en discuter avec elle, mais chaque fois, c’est la même rengaine. À New York, il fait trop froid, c’est trop bruyant, elle se sent étouffée au milieu des gratte-ciel. Tout lui manque, la nature, la plage, le soleil de LA. Pourtant, je crois surtout que ce sont ses amies, avec lesquelles elle adore dépenser son temps libre et faire la fête, qui sont la raison de ses allers-retours intempestifs à Los Angeles.
Je tente de retourner le problème dans tous les sens, je ne trouve pas de réponse à son comportement et je ne sais plus à quel saint me vouer pour que nous retrouvions notre complicité. Je me suis considérablement éloigné de Bethany, pensant que la source de nos disputes venait d’elle. Je ne lui parle plus autant qu’avant et en réalité, ça me manque. J’ai même effectué plusieurs pauses sur les réseaux sociaux. Blake affirmait que j’y passais trop de temps et que je ne m’occupais pas assez d’elle. Malgré mes efforts, rien n’a changé, elle part à Los Angeles dès qu’elle en a l’occasion. Avec le recul, j’en arrive à penser que le problème ne vient pas de moi. Blake prend l’excuse que Bethany et la situation géographique sont les responsables de la mauvaise ambiance qui règne entre nous. De mon côté, je crois plutôt que nos soucis sont dus à son éloignement qui n’a pas lieu d’être.
— Levi, tu as prévu quelque chose après notre départ ?
— Je ne sais pas, je n’y ai pas encore réfléchi… pourquoi ?
Je suis exaspéré, je sais qu’elle s’attend à ce que je lui dise que je vais rejoindre l’équipe, ou plutôt Bethany.
— Oh non pour rien, je voulais juste connaitre tes plans pour ta soirée.
— Je travaille ce soir. Je dois tourner des scènes de nuit. Je pense rentrer très tard.
Blake s’avance vers moi et pose ses lèvres contre les miennes tout en souriant. Je passe une main sur sa nuque et écrase durement ma bouche contre la sienne. Dans ce baiser, il n’y a aucune tendresse, juste de la colère.
— Tu peux habiller Jordyn ? Il est temps que nous partions.
Je me lève du canapé, attrape ma fille et l’enveloppe dans son petit manteau bleu marine à pois blanc. Je lui mets son bonnet de laine assorti ainsi que son écharpe. Je la couvre de façon à ce qu’elle ne puisse pas attraper froid et embrasse le morceau de peau qui dépasse de son cache-nez. Blake revient dans le salon avec sa valise, elle enfile sa doudoune et ses gants.
— Ma choupinette, d’ici à quelques heures, tu seras débarrassée de cet accoutrement. J’ai hâte de retirer tout ça moi aussi et d’exposer mon corps au soleil.
Je lève les yeux au ciel, me mords la langue ravalant les mots cinglants qui veulent franchir la barrière de mes lèvres. Avant que ma fille ne parte avec sa mère, je me baisse et l’inonde d’une tonne de bisous. Je déteste lorsque Blake l’emmène loin de moi.
— Je t’aime Jordyn. Sois sage avec maman, d’accord.
— T’aime papa.
Je les accompagne en bas de l’immeuble, Jordyn dans les bras. À l’extérieur, le taxi patiente. Après un ultime au revoir et un dernier baiser, j’attache Jordyn dans le siège auto. Blake contourne la voiture jaune et s’installe à ses côtés.
— Au revoir ma chérie.
— Bye papa.
— On s’appelle Levi, d’accord ?
— Ouais, à plus.
Je claque la portière du taxi qui s’insère ensuite dans la circulation. Je regarde le véhicule jaune emporter ma petite poupée brune. Je devrais être habitué, ce n’est pas la première fois qu’elles partent. Pourtant, lorsque je tourne les talons pour retrouver mon appartement, mon cœur saigne et une boule qui grossit dans la gorge.
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