Black Maple chapitre épisode 1 chapitre 1 à 4
Prologue
Assise sur mon lit, les pieds posés au sol, les yeux rivés sur l’extérieur, j’inspire et j’expire afin d’évacuer cette angoisse qui ne me quitte plus à l’approche de l’heure fatidique.
Je ferme doucement les paupières et je repense aux six derniers mois qui se sont écoulés. Ça n’a pas été une partie de plaisir, chaque jour a suffi à ma peine, mais comme je me l’étais promis, j’y suis arrivée. Tout n’est pas parfait, il me reste quelques lacunes que je vais devoir combler, mais selon mon ergothérapeute, mon kiné et le reste du staff médical, je suis prête. Seulement, j’ai l’impression de ne l’être qu’en apparence, car ici, circuler en fauteuil ne représente aucune difficulté. Que ce soit pour se doucher ou pour les gestes quotidiens, tout est agencé pour nous simplifier la vie.
Dans la réalité, rien ne sera facile, je le sais d’avance et ça me stresse au plus haut point. Je vais devoir m’adapter et je flippe. Le pire, ce ne sera pas chez moi, maman a tout fait pour que je m’y sente bien et à l’aise. Elle m’a montré de nombreuses photos de l’avancée des travaux que le propriétaire lui a autorisés à effectuer. Elle les a financés à l’aide de l’assurance-décès de mon père qui a péri dans l’accident. Celui-ci s’est produit lors de notre retour pour regagner notre maison, après avoir skié sur les pistes de la station Whistler Blackcomb au nord de Vancouver.
Le jour avait laissé doucement place à la nuit et la neige était tombée abondamment, rendant les routes de plus en plus glissantes. Mon père avait pris le virage en tête d’épingle sans ralentir, habitué à ces conditions de circulation. Notre Volvo XC40 était équipée de pneus hivernaux et de quatre roues motrices, autant dire qu’elle disposait de tous les prérequis pour nous éviter un drame.
Mon père n’avait pas vu le cerf au milieu du tracé et nous l’avions heurté de plein fouet. Le reste, c’est le trou noir, je ne me souviens que du choc que j’ai ressenti quand notre voiture a percuté l’animal. Je me suis réveillée à l’hôpital, seule et apeurée, étant donné que je ne sentais plus mes jambes. Un médecin est venu dans ma chambre et m’a expliqué que j’étais paraplégique. J’ai été touchée aux vertèbres L1 et L2. Il m’a rassurée aussi sur le fait que j’aurais peut-être la chance de retrouver un peu de mobilité, car ma moelle épinière n’était pas sectionnée. Un peu à la fois, il m’a servi d’autres informations sur mon futur quotidien, tel que ne plus pouvoir aller aux toilettes comme une personne valide, ça franchement, comme nouvelle, j’aurais pu m’en passer !
Six mois plus tard, je n’ai pas récupéré l’usage de mes jambes, mais je ressens l’envie de faire pipi, ce qui est déjà un bon point. Malgré tout, je me sonde à plusieurs reprises durant la journée, toutes les trois heures environ. Pourquoi ? Premièrement, c’est très fatigant d’aller aux toilettes et aussi parce que souvent la vessie ne se vide pas entièrement, de ce fait, à la longue des infections urinaires se déclarent.
Selon les soignants du centre, je peux garder espoir de retrouver d’autres sensations. Durant ma rééducation, j’ai appris à me transférer et je suis plutôt douée. Dans mon malheur, la chance m’a effleurée, je n’ai pas perdu mes abdos et chaque jour, je les ai travaillés avec le kiné. Ils sont solides comme de l’acier maintenant. Mon ventre n’a jamais été aussi plat et musclé. Mes bras sont ciselés et me permettent de me transférer avec aisance. J’effectue maintenant une vingtaine de tractions sans me fatiguer, alors qu’avant ce drame, j’étais incapable de décoller ne serait que les orteils.
J’ai également appris à me verticaliser, j’arrive à me tenir debout et même à marcher sur une dizaine de mètres avec mes orthèses cruro-pédieuses.
Pour avancer, je m’aide d’un déambulateur avec appuis brachiaux, ma démarche est imparfaite, je ressemble un peu à Robocop, mais je peux me déplacer et c’est génial. C’était mon objectif en arrivant dans ce centre. Évidemment, je ne les utiliserai qu’à la maison, impossible de sortir avec. Me tenir debout contribue à préserver mes tendons, mes ligaments, le retour veineux et d’autres bénéfices. Je fatigue très vite lorsque je suis debout, mais j’avoue que la station verticale me manque.
Concernant les soins personnels, j’ai beaucoup appris aussi, notamment à savoir me sonder. Les premières fois ont été pénibles, mais à force de persévérance, j’y suis parvenue. Pareil pour l’élimination des selles qui ne se fait pas de façon naturelle. J’utilise un suppositoire et j’attends qu’il agît. C’est super de dégazer à tous vents, sans mauvais jeu de mots, c’est très élégant, surtout quand une personne est là. Mais bon, ce n’est pas comme si j’avais le choix…
Pour l’habillage, au début, c’était sportif, revêtir un pantalon sous pouvoir bouger les jambes, une vraie galère. La technique acquise, en moins de deux minutes j’enfile un bas. Bon, j’admets, pour les jeans skinny il me faudra sûrement un peu plus de temps, je n’ai pas encore testé. Ok pour le sport, mais je n’ai pas encore l’intention de m’inscrire dans le livre des records, il faut bien en rire parfois sinon bonjour la déprime et j’ai de l’avance.
Un sourire vient fleurir mes lèvres lorsque j’entends le claquement des talons de ma mère dans le couloir.
— Faith, ma chérie, tu es prête ? me demande-t-elle à peine passée la porte, heureuse que je rentre à la maison.
— Comme tu peux le constater, j’ai préparé mes bagages et toute seule s’il te plaît, claironné-je comme une enfant.
— Faith.
Elle s’approche, pose ses mains sur mes joues et colle son front contre le mien.
— Je suis fière de toi.
Des larmes noircies par son mascara maculent ses pommettes. Je ne suis pas étonnée qu’elle se soit pomponnée. Je n’ai jamais vu ma mère sortir sans sa couche de make-up, elle est toujours tirée à quatre épingles. Hôtesse de l’air sur des vols courts, elle se doit d’être toujours présentable.
Ma mère est aussi blonde que je suis brune et ses yeux sont aussi bleus que les miens sont marron. Elle et moi, ne nous ressemblons pas le moins du monde. J’ai pris la beauté de ma grand-mère paternelle, de grands yeux chocolat, un regard de biche accentué par de longs cils que me jalousent beaucoup de filles. Une longue chevelure brune comme une parure que je natte souvent assortie d’une mèche épaisse qui me barre le front. Un teint couleur pêche, des lèvres roses pulpeuses que je tiens de ma mère. Elle a un long nez alors que le mien est court, légèrement retroussé. Elle a de jolies formes généreuses dont les hommes raffolent et que je n’ai pas, excepté la poitrine qui est moins importante. Cela dit cela me convient, je me trouve parfois sexy quand le moral est au beau fixe. Et c’est le plus important. Me sentir bien dans ma peau malgré mon handicap. Bon, je ne le pense pas toujours, mais quand c’est le cas, je me sens entière. Maman renifle, essuie ses joues et serre ma main.
Une chose est particulière concernant mes parents, ils étaient séparés, mais pas divorcés. Chacun vivait de son côté, d’ailleurs, je passais le plus clair de mon temps avec mon père, ma mère étant toujours entre deux avions.
Ils se voyaient de temps à autre et c’était un parfait équilibre pour eux comme pour moi, je l’avoue. Avant que mon père ne se décide à quitter notre foyer, mes parents ne faisaient que de se hurler dessus. La séparation leur a fait le plus grand bien, ils se sont retrouvés, mais ils ont choisi de vivre chacun de leur côté. Les petites manies du quotidien ont fini avec le temps par les rendre fous.
J’éloigne doucement ma tête et de mes pouces, j’efface la tristesse qui inonde ses joues.
— Tu as parcouru tellement de chemin Faith. Je suis heureuse que tu puisses enfin revenir à la maison.
Je lui souris puis la serre dans mes bras un long moment.
— Allez, maman, il est temps. Rentrons.
Elle recule et me laisse l’espace nécessaire pour que je puisse m’installer sur ma chaise en toute sécurité. Je positionne d’abord mes jambes sur les repose-pieds du fauteuil, puis je glisse mon postérieur sur l’assise et me voilà prête à rouler vers de nouvelles aventures.
Ma mère saisit ma valise puis mon sac contenant mes orthèses, j’embrasse du regard une dernière fois ce qui fut ma chambre ces six derniers mois puis m’élance vers la sortie.
Je m’appelle Faith Davis, j’ai presque dix-sept ans, je suis devenue paraplégique à cause d’un stupide accident de la route. Une nouvelle vie commence, une existence où j’ai tout à réapprendre, mais je vais y arriver. Je suis déterminée à ne rien lâcher, pour moi en priorité, mais surtout pour mon père qui n’a pas eu la chance de survivre.
Chapitre 1
Faith
Premier jour d’école après six mois en rééducation plus une semaine à la maison où j’ai pu prendre mes marques. Contrairement à mes craintes, tout s’est bien passé, en réalité, les travaux d’aménagements m’ont simplifié la vie.
Toute la salle de bains a été repensée. Notre douche intégrale a été enlevée pour laisser place à un vaste espace sans paroi équipé d’un siège. Pour l’accessibilité, la robinetterie et l’étagère à savons ont été descendues. C’est super !
Maman n’a pas pu m’emmener à l’école, impossible pour elle de poser congé, j’ai donc pris le bus de ville et me voilà devant l’établissement.
C’est la première fois que je mets les pieds dans cette High School. Elle ne se situe pas à côté de chez moi, mais à quarante minutes de trajet en bus.
Je me tiens immobile dans ce long couloir blanc garni de casiers jaunes, les mains agrippées aux roues. J’hésite à avancer, je stresse, je ne vais pas mentir et je me pose des questions sur la façon dont je vais être accueillie. J’ai croisé quelques étudiants qui m’ont lancé des œillades remplies de curiosité.
J’arrive à la pause du midi, les autres étudiants déjeunent au réfectoire. Apparemment, nous sommes nombreux, ce qui va me changer de mon ancien collège privé où nous étions un peu moins de quatre cents élèves. Ici, il faut compter le double, voire peut-être le triple. L’avantage, pas d’uniforme à porter et je pourrai mieux me fondre dans la masse, enfin je l’espère. J’étudie en douzième grade et dernière année de la High School, je devrais passer mon diplôme, le High School Diploma en juin l’année prochaine si tout se déroule correctement.
L’école a débuté depuis un mois, j’aurais aimé commencer à la rentrée comme tout le monde, malheureusement, ça m’était impossible. Je devais d’abord terminer ma rééducation puis m’adapter à la ville. M’habituer à prendre le bus accessible aux personnes à mobilité réduite, apprivoiser les trottoirs, monter et descendre les bordures, cela dit, Vancouver est bien aménagée pour les gens dans ma situation. J’ai dû aussi m’entraîner à ouvrir et fermer des portes assez lourdes et à faufiler mon fauteuil à travers l’espace restreint. Ce n’est pas un exercice facile et pour le moment, la chance m’a profité, des personnes sympathiques m’ont aidée.
J’entends du brouhaha venant du bout du couloir puis vois apparaître une première tête, suivi d’une seconde. Les étudiants déboulent en masse dans le corridor et se dirigent vers leurs casiers. Comme je l’avais deviné, je ne passe pas inaperçue, loin de là. Une centaine de paires d’yeux sont braquées sur moi, ce qui me met mal à l’aise. Je hais être dévisagée de la sorte. Chez certains, je décèle de la pitié, chez d’autres de la curiosité, quelques-uns m’ignorent totalement aussi, ceux-là sont mes préférés. Je déteste attirer l’attention, mais malheureusement, mon état ne m’aide pas.
Dès que je quitte la maison, je sens les regards. Les gens ne peuvent pas s’en empêcher, parfois des personnes osent venir me demander ce qui m’est arrivé. Je réplique par politesse, mais vraiment, ça me fait chier ! J’ai souvent envie de leur hurler des choses affreuses, cependant je me contiens, je ne veux pas faire d’esclandre alors je satisfais leur curiosité.
Je finis par donner une impulsion sur mes bras et mon fauteuil avance doucement entre les étudiants qui s’écartent de mon chemin, m’offrant ainsi un passage assez large. J’ai reçu le casier cent-quatre-vingt-cinq, il se trouve au milieu du couloir, côté droit. Pour le moment il n’y a aucun de mes voisins à l’horizon, je dispose donc de temps pour y déposer mes livres entassés dans mon sac à dos que je glisse sur l’avant. J’ouvre mon armoire, puis y laisse les manuels dont je n’aurai pas l’utilité pour mes deux heures de leçon de l’après-midi.
J’opère un demi-tour que je contrôle à la perfection et me pousse en direction de la salle de cours d’anglais sous les regards de plus en plus nombreux et insistants des autres élèves. Après quelques mètres, je m’arrête et consulte le plan du bâtiment. Je m’aperçois que je ne suis pas partie du bon côté. L’établissement est immense comparé à mon ancienne école. J’effectue un second demi-tour et me retrouve nez à nez avec une bande de gars tous aussi musclés les uns que les autres. C’est qui ces mecs, des bodybuilders ?
— Tu t’es perdue ? me demande d’une voix agréable le type métissé aux cheveux hirsutes et aux yeux si sombres qu’on dirait qu’une tempête fait rage au cœur de ses prunelles.
— Perdue ! Non, disons que je me suis trompée de chemin, réponds-je en le fixant, légèrement méfiante.
— Tu vas où ? m’interroge-t-il avec gentillesse et intérêt.
— J’ai un cours d’anglais, salle cent-trente-cinq.
— Ah oui, tu t’es trompée de chemin, c’est au Sud. Tu vois le croisement là-bas ? me demande-t-il en me le montrant du bout des doigts. Tu tournes à gauche, tu passes deux autres intersections puis c’est à droite. Ça ira, tu as tout saisi ?
— Oui, merci de ton aide, euh…
— Devin Lowery, se présente-t-il un sourire florissant sur ses lèvres charnues et voici mes potes, Landon Six et Brian Hollister. Habituellement, on est quatre, mais Cam est à la bourre. Et toi ?
— Faith Davis.
— Eh bien, enchanté Faith. Tu devrais filer avant d’être en retard.
— Encore merci pour l’aide Devin.
Je lui souris sincèrement puis pousse sur mes bras. J’avance de quelques mètres puis je les entends ricaner, l’un d’eux s’exclame sans aucune discrétion « sérieux Devin, une handicapée, rien ne t’arrête. »
Je ravale ma salive durement et continue mon chemin avec plus de force dans les poignets pour m’éloigner. J’ai conscience des difficultés que je vais devoir traverser. Vivre dans un fauteuil est sujet à des moqueries, surtout au collège où je vais côtoyer des jeunes âgés de quinze à dix-huit ans.
Je finis par trouver ma salle et je constate que je suis la première arrivée. La prof m’aide à m’installer en retirant l’une des chaises qui me gêne puis se renseigne sur mon niveau. Je lui apprends que j’ai étudié en distanciel durant ma rééducation et qu’en principe, je ne devrais pas être trop à la ramasse. Elle semble tranquillisée.
— Surtout, Faith, si tu as la moindre question, n’hésite pas à venir me voir et c’est pareil pour les diverses matières, parles-en de suite au professeur d’accord ? me dit-elle avec une certaine préoccupation.
— Oui madame, lui réponds-je avec beaucoup de sérieux pour la rassurer.
Les autres élèves arrivent quelques minutes après la sonnerie. Ils entrent dans la pièce en troupeau, puis ils me dévisagent avant de fixer mon fauteuil comme s’il en avait peur, ce qui me fait doucement sourire. J’ai envie de leur dire que cela ne s’attrape pas la maladie du fauteuil ! Ils ne risquent rien.
Ils finissent rapidement par se détourner de moi et s’installent dans un boucan phénoménal. Ils traînent les chaises sur le carrelage et claquent leur manuel devant eux. Des trousses s’ouvrent, des stylos sont posés avec force sur les tables, des sacs sont jetés au sol sans la moindre délicatesse. Je retrouve l’ambiance d’une salle de cours et toutes ces petites choses qui, aussi minimes et insignifiantes soient-elles, m’avaient manquées.
— Bien, maintenant que j’ai votre attention, nous pouvons commencer, annonce la prof.
Elle n’attend pas une seconde, elle tend le bras, saisit une feuille sur son bureau puis fait l’appel avant de se lancer dans ses explications. Heureusement pour moi, j’avais pu rattraper les derniers cours avec le site en ligne où les profs envoient chaque semaine les leçons, sinon je n’aurais rien compris.
À la sonnerie, tout le monde se précipite pour fourrer leur matériel dans leur besace et se rue vers la sortie comme s’ils avaient le diable aux trousses. Pourtant, cinq minutes nous sont attribuées pour nous rendre aux prochains cours, je considère ce laps de temps comme raisonnable. Je range mes affaires, replace mon sac sur mon dos, salue la prof et pars à mon tour. Mon après-midi se termine sur une leçon de littérature et si j’en crois le plan que j’ai étudié entre deux explications de la prof d’anglais, le local se trouve à l’opposé de celui-ci.
Je parcours les allées tout en esquivant les autres élèves qui marchent d’un bon pas vers leur salle. Quelques-uns m’évitent de justesse, d’autres s’excusent lorsqu’ils s’aperçoivent qu’ils gênent mon passage et se décalent pour me laisser de l’espace. Eh oui, chacun de nous doit s’habituer et prendre ses marques.
Je parviens enfin dans le couloir où se trouve la classe de littérature. Une dernière poussée sur mes roues et me voilà devant la porte fermée.
— Merde, je suis en retard, chuchoté-je pour moi-même.
Cinq minutes de battement, ce n’est pas suffisant pour moi finalement qui suis ralentie à tout-va par mes camarades. Flûte de chez flûte, bon oui, déjà avec la chaise, je ne passe pas inaperçue, mais là, c’est la cerise sur le gâteau. J’inspire et j’expire trois fois pour apaiser mes nerfs puis frappe doucement à la porte que j’ouvre quand j’entends la prof dire « Entrez. »
— Veuillez m’excuser pour mon retard, madame Smith.
— Ce n’est rien Faith, c’est bien Faith ton prénom, n’est-ce pas ? m’interroge-t-elle légèrement dubitative.
— Oui, oui, c’est bien ça, confirmé-je en la regardant droit dans les yeux.
— Bien. Va t’installer avec tes camarades, veux-tu ?
Je me tourne vers les élèves qui me scrutent avec attention et certains avec un rictus désobligeant. Je sens que mes joues rougissent par le malaise que me déclenche leur insistance à me fixer de cette façon, comme si j’étais une extra-terrestre venue d’ailleurs.
Je fais abstraction de leurs œillades et avance dans les allées assez larges, prenant soin de ne pas rouler sur les sacs qui gisent au bord des tables individuelles. Je m’arrête près de la place encore disponible, celle au quatrième rang, devant un type aussi imposant que les trois autres que j’ai rencontrés plus tôt. Le seul également qui ne me dévisage pas. Pour cause, son visage repose entre ses mains et son regard est rivé sur son livre. Ses lèvres remuent lentement, il est absorbé par sa lecture.
— Bon alors la handicapée, tu t’installes qu’on puisse commencer le cours ? me dit d’un ton railleur la blonde aux yeux bleus à ma gauche.
Cette réflexion a le don d’attirer l’attention du mec sérieux qui relève la tête aussitôt. Ses billes aux couleurs si particulières, bleu-vert, me fixent quelques secondes avant qu’il ne se lève. Il est immense, je ne plaisante pas quand je dis immense, il doit frôler le mètre quatre-vingt-dix. Je me sens ridiculement petite à côté, même sur mes jambes valides, je paraîtrais minuscule avec mon mètre soixante-cinq.
Comme je le disais, il a une carrure massive, il se dope aux stéroïdes ou quoi ? Ce n’est pas humain d’avoir cette stature à notre âge, si ? Je pose mon regard sur le rang plus loin et le type derrière à l’air normal, moins imposant, plus frêle. Je reporte mon attention sur le mec bien charpenté. Ses cheveux châtain foncé coiffés avec du gel sont plus longs sur le dessus que sur les côtés. Une barbe assez épaisse lui donne un air très viril et le fait paraître beaucoup plus âgé. Peut-être qu’il l’est.
Bref, c’est le genre de garçon dont les filles raffolent et dévorent du regard. Comme je suis faible, je ne peux m’empêcher de ressembler à l’une de ses midinettes et de baver sur ce beau spécimen qui, sans aucun doute, ne s’intéressera jamais à moi.
Chapitre 2
Camden
Le cours de littérature est mon préféré. J’adore étudier de nouvelles œuvres et j’ai hâte d’analyser le roman que nous a demandé de lire madame Smith.
Je suis un élève très appliqué et ne prends pas les cours à la rigolade. Mon objectif est d’intégrer l’université de Vancouver et surtout de poursuivre le hockey. J’aimerais devenir professionnel et je me donne tous les moyens nécessaires pour y parvenir, que ce soit sur la glace ou au collège. Les résultats scolaires font partie des exigences si je veux continuer mon sport.
En toute modestie, je suis le meilleur de mon équipe et je sais que j’ai toutes mes chances d’atteindre mon rêve. Depuis que j’ai enfilé mes premiers patins et glissé sur la piste avec une crosse entre les mains, je m’entraîne sans relâche pour y parvenir. Je me suis perfectionné au fil du temps, j’ai amélioré mon endurance, je me suis musclé pour gagner en puissance et ne pas me laisser pénaliser lors d’un contact ou d’une bagarre. J’analyse chaque match des pros diffusé à la télévision afin d’affiner mon jeu. Je pratique également le yoga pour me détendre et garder une certaine souplesse, ce sport c’est ma vie.
Installé au cinquième rang, je sors mes affaires et ouvre le livre pour relire mes annotations, ignorant ma voisine. Rachel Slater, une belle fille, blonde, les cheveux mi-longs, de grands yeux bleus qu’elle accentue avec une touche de maquillage, un teint pâle et des lèvres fines. Son corps pulpeux laisse apparaître une paire de seins assez généreuse et des rondeurs bien placées qui animent les mecs, sauf moi. Cette nana connaît un succès fou et pourrait sortir avec n’importe quel gars, seulement, j’ai écopé de la première place de son tableau de chasse et elle ne me lâche pas la grappe à mon grand dam.
— Camden ? chuchote-t-elle.
— Hum… ?
Je lui jette un œil et constate qu’elle s’est penchée vers moi, me dévoilant volontairement la naissance de sa poitrine.
— Tu as vu la nouvelle ? Elle circule en chaise roulante, m’apprend-elle avec une sorte de dégoût dans le regard.
— Euh non, non je n’en ai pas encore eu l’occasion, réponds-je en me redressant, l’ignorant de nouveau.
Je replonge le nez dans mes notes, je suis si concentré que je ne perçois plus ce qui se passe autour de moi. J’émerge seulement lorsque j’entends Rachel débiter des paroles acerbes. Je relève la tête et me lève subitement, faisant face à la nouvelle qui me détaille de la tête aux pieds. Je ne me gêne pas pour la regarder à mon tour. La candeur de son visage et son regard de biche m’envoûtent. J’éprouve des difficultés à détourner les yeux.
Un raclement de gorge détourne mon attention. Je me tourne vers Rachel et la foudroie du regard avant de reporter mon attention sur la nouvelle arrivée. Je tends un bras devant moi, bouge la chaise pour lui permettre l’accès à la table, puis me rassois.
— Merci, me murmure-t-elle en douceur.
Je lui offre un petit sourire et la regarde manœuvrer son fauteuil habilement afin de se placer devant la table. L’étroitesse de l’espace ne l’empêche pas de s’insérer sans qu’elle n’ait à s’y reprendre en plusieurs fois, elle gère à la perfection.
— Merci Camden d’avoir aidé Faith, c’est très gentil, me remercie notre enseignante. Rachel, tu viendras me voir à la fin du cours, lui ordonne-t-elle sur un ton peu avenant.
Je sors de la classe prestement dès que la sonnerie résonne à travers les murs et me mets à courir en direction de la patinoire. Si je ne veux pas être en retard, je dois presser le pas et ainsi éviter une réflexion de l’entraîneur qui est aussi mon père.
Entre nous ce n’est pas la bonne entente. Incapable de se débrouiller, il a toujours besoin d’aide pour n’importe quoi. Pas étonnant que ma mère ait fini par divorcer alors que je venais de souffler ma première bougie. Avoir deux gosses à la maison, lui et moi à cause de son comportement plus enfantin qu’adulte, ont dû l’épuiser. Sans compter qu’il la rabaissait, l’insultant de fainéante et de minable. Maintenant, il s’en prend à moi et je ne sais pas pourquoi. Il n’est pas sain d’esprit. C’est tout ce que je peux lui trouver comme excuse.
Je vis avec ma mère qui s’est remariée avec Orion Rowe quand j’avais trois ans. De leur union sont nées mes deux sœurs. Elles ont treize ans. Des jumelles, Gracelyn et Evelyn qui illuminent ma vie. J’adore passer des moments avec elles. D’ailleurs, lorsque je ne joue pas au hockey, je leur consacre mon temps libre.
J’arrive à la patinoire et constate que je ne suis pas le premier. Aïe !
— Tu es en retard, siffle mon paternel dès qu’il m’aperçoit aux abords du vestiaire.
Je le fixe quelques secondes avant d’entrer dans la pièce sans lui accorder la moindre parole. Une fois de plus, il cherche la confrontation. J’y suis habitué et si par le passé je rentrais dans son jeu, aujourd’hui ce n’est plus le cas. J’ai enfin compris comment il fonctionnait, le mieux c’est de l’ignorer pour ne pas ajouter d’eau à son moulin.
Je salue mes potes déjà présents, Devin, Brian et Landon, mes meilleurs amis puis je me prépare sans un mot. Mon père veille et je n’ai pas envie de me prendre d’autres remarques.
J’enfile un collant noir, un tee-shirt manches longues assorti, mon short qui renferme une coquille de sécurité, les jambières qui protègent les tibias et les genoux et la culotte rembourrée au niveau de la taille. Le bas de mon corps maintenant équipé, je chausse mes patins, des Bauer Vapor 2X pro SR qui m’ont coûté une petite fortune, un peu moins de sept cents dollars. Leur confort et leur finesse me procurent une bonne stabilité et soutien, je les adore et ne voudrais plus en changer.
Par-dessus mon tee-shirt, je passe mon plastron, je fais glisser mes coudières et les positionne correctement et enfin, je revêts le maillot de l’équipe. Je place mon protège-cou, celui pour mes dents et mon casque. Il ne me reste plus que les gants. J’attrape ma crosse et me voilà prêt pour l’entraînement.
Premier sur la glace, je patine pour m’échauffer sous le regard de mon père qui m’assène de conseils que j’écoute à moitié. Il me fatigue. D’autres joueurs se joignent à moi, dont mes potes. Nous tournons une trentaine de fois autour de la piste, effectuons des exercices avant d’entamer un match.
L’entraînement dure deux heures où je me donne à fond sous les critiques toujours dépréciatives du patron. « Tu ne vas pas assez vite, tu as mal pris ton virage, tu ne maîtrises pas assez le palet, tu n’arriveras à rien de bon de cette façon… » Je passe le reste, je ne le satisfais jamais.
Après une douche bien méritée, je rassemble mon équipement et sors du vestiaire en compagnie de Devin et Brian que je quitte sur le parking du collège après avoir longuement discuté de notre prochain match.
À peine rentré, j’embrasse mes petites sœurs que je soulève chacune à leur tour.
Gracelyn et Evelyn alias Grace et Evie, se ressemblent comme deux gouttes d’eau. Enfin, elles ont quelques différences. Au premier regard, les personnes qui ne font pas partie de notre cercle relationnel sont incapables de dire qui est Grace ou Evie. J’avoue que parfois, par manque d’attention, je m’emmêle les pinceaux.
Les jumelles frisent et ont de grands yeux bleus qu’elles tiennent de ma mère, un regard espiègle, un teint naturellement hâlé typique de Orion. Concernant leurs différences, Gracelyn a hérité d’un grain de beauté qui se trouve juste au bord du blanc de ses iris, petit et discret, il suffit malgré tout à la distinguer. Evelyn se démarque par ses oreilles légèrement plus décollées que celle de Grace, mais j’avoue que lorsqu’elles détachent leurs crinières, il est difficile de les discerner. En revanche, leurs caractères les opposent. Grace est la plus calme et la moins téméraire, elle aime lire et taquiner la manette sur les jeux vidéo. C’est une solitaire comparé à Evie, qui, elle, adore être entourée.
— Alors les filles, comment s’est passée votre journée ? leur demandé-je après que chacune a reçu son câlin.
Evelyn me répond que c’était bien, contrairement à Gracelyn qui se plaint d’un mauvais résultat en maths qui lui a miné le moral.
— Tu n’as pas compris ? Je peux t’aider si c’est le cas.
— Merci. C’est gentil, mais je vais voir ça avec papa, je sais à quel point tu es débordé en ce moment.
Je frotte ma paume dans ses cheveux que je brouillonne un peu en la faisant râler, puis je chemine jusqu’à la cuisine où je trouve ma mère devant les fourneaux.
— Ça sent bon ici, maman.
J’appuie un baiser sur son crâne lorsque j’arrive à sa hauteur et jette un œil dans la marmite.
— Un ragoût de bœuf, on va se régaler.
J’en ai l’eau à la bouche et salive sur la nourriture dont l’odeur embaume la maison.
— Comment s’est passée ta journée, mon chéri ?
— Bien dans l’ensemble. Oh, il y a une nouvelle élève, l’informé-je tout en attrapant une pomme dans le panier derrière elle.
— Jolie ? me demande-t-elle en se tournant légèrement vers moi.
Je souris et croque à pleines dents dans le fruit rouge et juteux. Je mâche quelques secondes avant d’avaler.
— Plutôt mignonne oui, mais je t’arrête tout de suite maman, non, elle ne m’intéresse pas.
Je dépose un baiser sur sa joue.
— Je file réviser, appelle-moi pour le dîner.
Je n’attends pas sa confirmation et file à l’étage. Dans ma chambre, je m’installe derrière mon bureau, sors mes livres et me mets au travail.
Chapitre 3
Faith
Je sors du cours de littérature après tout le monde et me rends dans les toilettes alors que le collège se vide doucement. Certains étudiants, vont vers leurs activités sportives ou culturelles, d’autres rentrent chez eux en transport scolaire ou en voiture. Moi, je vais me sonder avant de prendre le bus de ville qui me ramènera chez le kiné.
Je ferme la porte derrière moi et vérifie le verrou, puis déballe le matériel dont j’ai besoin pour effectuer mon soin. J’ai réalisé ce geste des centaines de fois depuis mon accident et je le maîtrise à la perfection. C’est devenu au fil du temps quelque chose de naturel. Je jette le tout dans la poubelle, réajuste mes vêtements et me lave les mains.
Dehors, je roule jusqu’à l’arrêt le plus proche et patiente l’arrivée du bus en écoutant de la musique avec mes AirPods. À l’approche du car, je fais signe au chauffeur que je veux grimper. J’attends qu’il déploie la rampe d’accès en m’éloignant du bord de la chaussée. Elle se met en place lentement, mais sûrement. Il ne faut pas être pressé ! Je pousse sur mes bras pour monter quand enfin la plateforme cesse tout mouvement. C’est bon, enfin. J’ai toujours l’impression que ça prend une éternité, parce qu’avant tout était bien plus simple. Je scanne ma carte puis je vais me positionner au milieu, à l’endroit qui m’est destiné. Chouette, une place attitrée, j’en rêvais ! Je me place parallèle à la fenêtre et bloque les freins avant que le conducteur ne redémarre. Trente minutes plus tard, j’appuie sur le bouton réservé aux personnes à mobilité réduite et qui indique au chauffeur la nécessité de positionner la rampe d’accès. J’attends que les autres usagers soient sortis afin de me faciliter le passage jusqu’à l’avant pour rejoindre le trottoir. C’est tout de même une belle galère de ne plus se tenir sur ses jambes !
Première étape validée sans encombre. Je sais que ça ne sera pas toujours le cas. Je pousse sur mes mains et mène mon fauteuil jusqu’au cabinet du kiné.
— Bonjour, Faith, ça va ? Alors ce premier jour d’école ? s’intéresse-t-il en venant m’accueillir.
— Bonjour Vassily, correct dans l’ensemble. J’ai survécu en tout cas, dis-je en rigolant.
— Tant mieux. Prête à survivre à nouveau ? ironise-t-il en me suivant jusqu’à la salle de torture.
Je me transfère sur la table médicale, retire mes baskets et m’allonge, laissant à Vassily le soin de s’occuper de mes jambes pour qu’elles gardent une certaine souplesse et une bonne mobilité. Je passe sur le ventre après une vingtaine de minutes et c’est reparti pour d’autres exercices. Heureusement, le kiné essaie de rendre ces moments agréables en me parlant de la pluie et du beau temps. Je ne peux pas dire que ce soit des discussions que j’adore, mais au moins, ça permet que le temps s’écoule plus rapidement. À la fin de la séance qui aura duré une heure, il me masse puis me rend mes chaussures que je chausse avant de m’installer sur mon fauteuil.
— À mercredi et ne te stresse pas trop pour ta session de natation demain, tu vas gérer comme une pro.
— Nous verrons, mais je suis déterminée à y arriver, lui réponds-je pleine de conviction.
Ce sera une première en tant que paraplégique, mais j’ai foi en l’équipe qui dirige la piscine. Ils m’ont assuré qu’ils m’aideraient lorsque je les ai rencontrés la semaine dernière et ils avaient déjà des idées afin que je progresse rapidement. Pour le moment, j’ai programmé une heure hebdomadaire. Je verrai au fil du temps si je peux en ajouter une autre, sachant que les séances de kiné me prennent déjà trois après-midis. Sans compter que le samedi matin j’ai prévu de me rendre à la musculation pour continuer à entretenir le haut de mon corps et mes abdos.
Comme à l’aller, je patiente à l’arrêt de bus. C’est long ! Je suis usée et je n’ai qu’une envie, rentrer. Il me reste quinze minutes de trajet avant que mon désir ne soit assouvi. La fatigue et cette première journée d’école, me rendent irritable au possible. Je souffle de frustration en grimpant dans le bus. Après être descendue, je roule jusqu’à notre appartement.
À peine la porte franchie, je me rends à la cuisine, je meurs de faim. Pour me faciliter la tâche, maman m’a réservé deux placards du bas où elle a disposé de la vaisselle puis mes gâteaux. Je jette un œil sur le placard du haut et rêve de pouvoir l’atteindre ! Les choses basiques du quotidien me manquent réellement. Je baisse les yeux et sors un paquet de biscuits. J’en prélève deux et range le reste. Dire qu’avant je pouvais m’enfiler un paquet sans aucun scrupule. Les choses ont bien changé. Dorénavant, je dois contrôler mes apports en calories si je veux continuer à me transférer facilement. Hors de question de se laisser aller.
Je passe le début de soirée allongée sur mon lit à moitié somnolente. Cette séance de kiné m’a littéralement épuisée. Vassily dit que c’est normal, qu’au fil du temps, mon corps va s’accommoder et que la fatigue s’estompera, je l’espère, car j’ai l’impression de ne pas profiter beaucoup de mes journées.
Après m’être délassée une heure, je me transfère sur mon fauteuil, roule jusqu’à mon dressing et me laisse glisser sur le sol avec douceur. Je récupère mes orthèses qui me servent à me maintenir debout. Je les enfile en les ajustant à l’aide des scratchs.
— Robocop le retour.
Je m’esclaffe comme une idiote et ris à gorge déployée. La pression de la journée retombe instantanément. Je soupire, souris, puis je me rechausse et me relève en plaquant une main sur mon fauteuil l’autre sur l’étagère de mon dressing.
— Un, deux, trois…
Je remonte à la force de mes bras sur mon bolide.
— Même pas essoufflée, chouette !
Je sors de ma chambre et chemine au salon où est rangé mon déambulateur. J’enclenche les freins de ma chaise roulante, tends mes jambes et verrouille l’orthèse au niveau des genoux, puis je glisse mes fesses au bord de l’assise. J’attrape le déambulateur et me hisse sur mes pieds.
Je prends quelques secondes pour me stabiliser et habituer mon corps à cette position. J’ai répété cet exercice un nombre incalculable de fois lors de mes dernières semaines au centre. Je le maîtrise relativement bien, mais pas sans épuisement. Maintenant que je suis debout, j’hésite. Est-ce que je reste en position statique en appui sur mon déambulateur ou est-ce que j’avance un peu sachant que je suis seule et que le risque de tomber existe ?
Finalement, j’opte pour une courte marche jusqu’à la cuisine. Cinq mètres séparent les deux pièces. Je me concentre. Je pousse le déambulateur puis je traîne sur l’avant la jambe droite puis la gauche. Je parcours la petite distance en trois minutes. Ça peut paraître long, mais pour moi c’est peu et surtout c’est une jolie victoire. Je refais un bout de chemin en allant jusqu’à la table de la salle à manger puis je retourne au salon où je m’assois dans mon fauteuil totalement vidée et épuisée. Je décide de laisser les orthèses, trop exténuée pour descendre au sol et les retirer.
Je prends mon dîner seule. Une salade composée. Il est un peu plus de dix-neuf heures et maman ne rentrera pas avant vingt et une heures. Je suis tellement fatiguée que je ne suis pas certaine de pouvoir attendre son retour. Impossible de l’appeler en visio pour discuter de cette première journée puisqu’elle plane déjà dans le ciel. Son avion décollait à seize heures vingt de Los Angeles pour un atterrissage à Vancouver prévu à dix-neuf heures vingt. Elle devrait quitter l’aéroport vers vingt heures trente.
Après avoir débarrassé la table, je vais dans ma chambre retirer mes orthèses. Finalement, je reste sur mon fauteuil et parviens à les retirer dans la position assise. Je m’aperçois qu’il sera plus facile de les mettre aussi de cette façon, sacrée découverte. Gain de temps et moins de fatigue. Ensuite, je migre aux toilettes.
Ma petite affaire terminée, j’attrape une grande serviette que j’accroche au crochet juste à côté de la douche. Je me déshabille et glisse mon corps sur le siège. Je laisse l’eau tiède couler un moment sur ma peau, délassant mes muscles. Une fois lavée, je coupe le jet et range le pommeau sur son support. Je saisis la roue de mon fauteuil que j’approche. Je prends le drap de bain avec lequel je m’essuie avant de le poser sur l’assise de mon bolide. Je me transfère, chope les pans de la serviette que je replie sur moi et roule jusqu’au lavabo. Je démêle mes cheveux et je termine par le brossage des dents.
Ma toilette finie, je vais dans ma chambre et revêts un simple tee-shirt et une culotte. Je me place sur mon lit pour m’habiller et comme je suis encore moite, les choses se compliquent. Ma culotte s’enroule ! Génial ! Une vraie galère à enfiler. Encore un effort et la voilà enfin en position. Les gestes censés être simples, me prennent toujours trois plombes. Qui disait que je ne faisais pas de sport ? Je récupère la serviette mouillée sur mon fauteuil et d’un geste fluide, la jette dans ma corbeille à linge sale.
— Panier ! Yes…
Le réveil m’indique qu’il est presque vingt et une heures, en fin de compte, peut-être que je verrai ma mère. Je repousse les couvertures et me niche en dessous. Il ne me faut pas plus de cinq minutes avant que mon corps ne se détende totalement. Je lutte pour ne pas sombrer, voulant désespérément discuter avec maman.
— Faith ?
J’ouvre brutalement les yeux, il est vingt et une heures dix. Fichtre, la fatigue l’a emporté sur ma volonté à rester éveiller.
— Oh ! Tu es déjà couchée, ma chérie. Dure journée, j’imagine.
Elle entre dans ma chambre et s’assoit sur le bord de mon lit. Elle retire ses escarpins et s’allonge à mes côtés.
— Raconte-moi mon cœur. Comment s’est passée l’école ? Tu t’es fait des amis ?
— Aucun maman. Si tu veux tout savoir, ils me regardent tous comme si je venais d’une autre galaxie. Concernant les cours, ça va, finalement je n’ai pas cumulé trop de retard, enfin pas en littérature, ni en anglais. On verra pour les autres matières.
— C’est une bonne chose pour l’école. Concernant les relations, eh bien, laisse-leur un peu de temps pour qu’ils s’aperçoivent que tu es une fille géniale.
Elle me gratifie d’un clin d’œil avant de poser un baiser sur ma joue.
— Bon sinon, tu as mangé ?
— Hum hum.
— Tu t’es mise debout ?
— Hum hum,
J’émets un bâillement. J’essaie de garder les paupières ouvertes, de me concentrer sur la conversation, mais je perds le fil, la dernière phrase que j’entends c’est :
— Samedi, on ira commander ton fauteuil roulant, celui en location va nous revenir trop cher. Je vois que tu es fatiguée, je te laisse ma chérie. Bonne nuit.
Chapitre 4
Faith
Six heures quinze, le réveil sonne.
Je l’éteins et me redresse après quelques secondes. Je grogne, je n’ai pas envie de me lever, il est trop tôt. L’envie de flemmarder me titille, pourtant, je me décale au bord du matelas. Quand c’est l’heure, c’est l’heure. Je frotte mes yeux et m’étire avant d’attraper mes jambes que je pose sur le repose-pieds du fauteuil et me hisse sur celui-ci. À moitié endormie, je propulse mon bolide jusqu’à la salle de bains et m’asperge le visage d’eau froide. C’est pas du tout agréable, cependant ça a le mérite de me réveiller.
Dans la cuisine, devant la Dolce-Gusto, j’hésite entre un café, un chocolat ou un thé à la menthe. Je finis par jeter mon dévolu sur un chocolat.
— Bonjour, ma beauté ! me salue ma mère en arrivant dans la cuisine. J’amène ta boisson à table ?
— Je peux me débrouiller, lui dis-je juste pour la forme.
Elle le sait, mais elle adore m’aider.
— Hier, tu t’es endormie comme une masse, ma chérie.
— J’étais crevée après cette journée épuisante, j’imagine que celle qui m’attend sera du même niveau.
— Oh ! Mais oui, c’est ton premier cours de natation, en plus de ta journée d’école ! Tu as déjà préparé ton sac de piscine ?
— Oui, il ne me reste plus qu’à nager comme un poisson dans l’eau, dis-je pour détendre un peu ma mère qui semble angoissée.
— J’aurais aimé être là pour toi, pouvoir t’assister et ne pas te laisser gérer seule. J’ai vraiment l’impression de t’abandonner depuis ton retour.
— Maman, maman, maman. Stop ! Ça va, je sais me débrouiller et tout se passera bien à la piscine. On a vu ensemble avec le personnel et ils nous ont garanti qu’ils m’aideraient. Ne t’inquiète pas d’accord ? réponds-je pour la rassurer et dédramatiser la situation.
— Comment peux-tu être si courageuse ? Je t’admire. Ta vie a été bouleversée et malgré tout, tu restes optimiste et gardes le sourire.
— J’ai seulement perdu l’usage de mes jambes, pour le reste, je suis toujours moi.
— Je t’aime ma chérie, tellement.
— Moi aussi.
Je bois mon breuvage, regarde ma montre et file dans ma chambre. Il est déjà six heures cinquante, mon bus passe dans vingt-cinq minutes. J’ouvre mes placards, attrape un legging, une chemisette blanche et un pull gris à col V. Une tenue que j’adore porter et dans laquelle je me sens bien. Je me transfère ensuite sur mon lit et commence par enfiler le bas. Une fois habillée, mes sneakers aux pieds, je roule jusqu’à la salle de bains où je me brosse les dents et décide de ne pas tresser mes cheveux. Cette fois je les attache simplement avec un élastique. Je me regarde dans le miroir et me trouve jolie. Je remarque que j’ai encore de beaux cernes sous les yeux. Ouille… pas le temps de les camoufler avec du maquillage et quand bien même si j’en avais, je ne suis pas certaine que j’en appliquerais. Je ne suis pas une adepte des cosmétiques, pourtant, à l’instant je pense en avoir besoin mais bon, quoi qu’il en soit, l’eau et le maquillage ne font pas bon ménage. Je finis par me détourner du miroir et avant de quitter la salle de bains j’emporte ces maudites sondes que je déteste au plus haut point. J’aimerais tellement retrouver ma vie d’avant. Surtout ce côté-là, pouvoir aller aux toilettes comme tout le monde ne serait pas du luxe ! Un jour, j’ai espoir.
— Je suis prête maman.
Elle regarde sa montre et me sourit.
— Waouh, pas mal, il est sept heures cinq, tu as le temps de te rendre tranquillement à ton arrêt.
— Y’a du progrès c’est vrai.
Je ris avec elle.
— À ce soir ma belle. Passe une bonne journée. J’ai mis ton déjeuner dans ton sac et essaie de te faire des amis. Je termine ce soir à dix-neuf heures.
— OK maman, à plus. Bonne journée à toi. Je t’aime.
— Moi aussi Faith.
Le trajet en bus s’est bien déroulé et je me trouve maintenant devant la High-School où les élèves se précipitent pour entrer. Je m’active également, la sonnerie devrait retentir d’ici dix minutes et un détour par mon casier s’impose.
Comme la veille, les regards convergent sur moi et personne ne me parle. Je ne prête pas attention à leur comportement et avance en fixant un point. Deux filles campent devant mon objectif et discutent comme si elles avaient tout le temps au monde, ce qui n’est pas mon cas.
— Excusez-moi, j’aimerais ouvrir mon casier.
— Oh ! Euh… oui, on va se pousser.
La place libérée, je glisse mon sac de natation et m’empare des manuels dont j’aurai besoin pour mes cours du matin. Science, maths, littérature et technologie des arts. Un bon programme en soi. Je recule, mais je me retrouve bloquée.
— Wow, doucement, tu as failli m’écrabouiller les pieds, s’écrie une voix masculine derrière moi, retenant mon fauteuil par les poignées.
Je pivote en faisant attention cette fois qu’aucun obstacle n’entrave ma trajectoire et tombe sur un visage que je connais, le mec qui m’a secouru hier. Camden si je me souviens bien. Il ne s’est pas présenté officiellement, mais la prof l’a remercié de m’avoir aidée.
— Je suis désolée, m’excusé-je d’un air contrit.
— Non, c’est rien, t’inquiète pas. Au fait, moi c’est Camden Scott.
— Faith Davis, enchantée, me présenté-je en lui souriant.
Il me fixe quelques instants et j’en profite pour m’attarder sur la couleur de ses yeux. Ils sont verts sur trois, peut-être cinq millimètres près de la pupille et le reste de l’iris est bleu. C’est étonnant et presque irréel, un peu comme sa stature d’ailleurs.
— Putain Cam, magne-toi on va être en retard, s’écrie l’un de ses potes plus loin.
— Ouais, j’arrive, les mecs. Eh bien, à tout à l’heure Faith, on se voit en cours de littérature ?
Je n’ai pas le temps de répondre que déjà il a filé. Je me ressaisis et à mon tour je me bouge. Ma première heure s’est écoulée à une vitesse folle. Je me dirige vers mon cours de maths où j’arrive la dernière, mais pas en retard. Au quatrième rang, je distingue un visage familier, celui de Rachel qui discute avec une autre fille. La place au premier rang étant libre, je m’y arrête. Je culbute la chaise qui se fracasse sur le sol. Impossible de la récupérer. Merde, fais chier ! Plus empotée tu meurs. Une fille typée asiatique se lève et me vient en aide.
— Merci.
— De rien, j’aurais dû y penser. Je m’appelle May-Lee.
— Faith.
— Je le sais, tout le monde parle de toi.
— Super…
Je souffle d’exaspération, me voilà propulsée au rang de star du collège et pas pour mes prouesses sportives. Je préfère en rire qu’en pleurer. De toute façon, comme disait toujours mon père, ce qui ne vous tue pas vous rend plus fort. Mais quand même, je me serais bien abstenue de l’étiquette qui va me suivre partout où je vais passer. L’handicapée, la fille au fauteuil, tout ce que vous voulez. Quelle plaie !
Après les maths, je me rue aux toilettes. Le temps de m’occuper de mes besoins, la pause est terminée. Privée de récré également. Je me demande quelles sont les choses que je vais encore perdre ? Plus de récré, plus de vie sociale et davantage de moqueries. Bon j’arrête de me plaindre, il y a bien pire dans la vie. Sur ces bonnes paroles, je me rends en classe de littérature.
— Salut, Faith, je fais la route avec toi, enfin si tu veux, me propose Camden qui est arrivé à ma hauteur.
— Oui, oui, bien sûr.
— Alors Faith Davis, d’après Brian, tu es calée en science. C’est vrai ?
— Je me débrouille.
— Et en littérature ?
— Je me débrouille aussi.
— OK, donc en conclusion tu te débrouilles dans tout.
— Ah non !
Je rigole doucement.
— Le sport, ça n’a jamais été mon truc, sauf le ski, conclus-je et toi ?
— Moi ! Je me débrouille dans toutes les matières, j’excelle au hockey sur glace et je suis zéro en… je crois que je suis nase dans aucune matière.
Nous éclatons de rire et je suis tout de suite fusillée par deux prunelles bleues. Celles de Rachel qui patiente devant l’entrée de la salle. C’est quoi son problème ? Elle détourne les yeux et envoie un sourire des plus aguicheurs à mon compagnon de trajet.
— Cam, je t’attendais, serais-tu d’accord pour travailler avec moi sur notre projet commercial ?
— Désolé Rachel, j’ai un binôme, une prochaine fois peut-être.
— Je prends note.
Elle s’agrippe à son bras et l’entraîne dans la classe tout en me jetant un regard torve. Je pivote et passe la porte, l’ignorant et ne voulant pas envenimer la situation. Je salue notre professeur de littérature, madame Smith, puis m’engouffre plus loin dans la salle. Camden pose son sac au cinquième rang, à croire que cette place lui est réservée et comme la veille il m’aide à m’installer.
— Merci Camden, c’est sympa.
— Non, non c’est normal.
Son sourire illumine son visage et il me gratifie d’un clin d’œil avant de s’asseoir. Rachel n’a rien manqué de cette scène et m’envoie un regard assassin. Aïe, je sens que je me suis fait une ennemie sans même avoir eu besoin de lever le petit doigt. Ça promet !
Le dernier cours du matin, mon favori, défile trop rapidement à mon goût, j’ai à peine réalisé une esquisse de mon projet en art que déjà la sonnerie annonçant la fin du cours retentit. Je range mon matériel et retourne aux casiers afin d’échanger mes manuels.
Au réfectoire, je suis accueillie par un brouhaha assourdissant, les élèves parlent tous aussi fort les uns que les autres pour essayer de se faire entendre. Je reste à l’entrée et scanne la zone. On y retrouve le coin des sportifs qui comprend Camden, ses amis, Rachel, May-Lee et trois filles. Un peu plus au loin, je dirais que ce sont les geeks, ils tapotent tous l’écran de leur téléphone et parlent de manière très animée. De l’autre côté, la table des intellos, je les reconnais à leur air sérieux et quelque peu pincé. Puis, la tablée des littéraires, quelques-uns sont en cours avec moi et débattent d’un livre qu’ils tiennent en main, près d’eux, l’espace des scientifiques, puis celui des élèves qui ne se situent dans aucun des groupes. Je crois bien que je n’ai ma place dans aucun d’eux. De toute manière personne ne m’invite à les rejoindre.
Je roule jusqu’à une table libre au fin fond du réfectoire et me pose au bout. Ainsi, je n’ai pas à bouger les chaises pour m’installer. Seul bémol, je tourne le dos aux étudiants, cependant je fais face aux fenêtres qui donnent vue sur le stade de l’école. Superbe vue !
Mon repas terminé, je débarrasse ma table ignorant les regards. J’espère tout de même qu’ils vont se calmer et cesser de me lorgner comme si j’étais un extra-terrestre. Je sors du réfectoire, les occultant tout en étant agacée. Merde ! Je veux retrouver une vie normale. Je déteste ce fauteuil ! Je hais le fait que l’on me reluque avec insistance comme le fait ce type qui me passe devant.
— Quoi ? J’ai un bouton sur le nez ? lui demandé-je avec une bonne dose d’agressivité.
Aucune réponse, il continue son chemin sans même se retourner. C’est peut-être moi le problème ! Peut-être que comme je ne m’accepte pas vraiment je vois le mal partout. C’est possible après tout. Je pousse un soupir et m’encourage à voix haute.
— Deux heures en enfer avant la séance de natation qui je l’espère me permettra de me détendre.
Mes cours sont finis et j’arrive à la piscine.
Nous y voilà, c’est le moment. Après avoir enfilé mon maillot de bain, non sans difficulté, je retrouve le maître-nageur qui m’est attitré, Kyle. Il m’explique rapidement comment va se passer la séance et après la douche que j’ai prise dans le fauteuil adapté je me rends au bord du bassin.
— Maintenant Faith, je vais te demander de t’installer sur l’élévateur, mon collègue va te descendre dans l’eau et moi je vais te réceptionner. C’est bon pour toi ?
— Oui, je crois.
J’avoue que je n’en mène pas large. Je m’installe sur la machine, attache ma ceinture comme le réclame le collègue de Kyle, puis il me chemine jusqu’au bassin. Je descends en douceur et avec appréhension. Mes jambes touchent l’eau et c’est toujours aussi étrange de ne rien ressentir.
— Waouh, c’est froid, ne puis-je m’empêcher de relever lorsque l’eau touche mon ventre.
— Une fois que tu auras fait quelques longueurs tu n’auras plus froid, m’assure Kyle en avançant. Comment tu te sens ?
— Bien. C’est agréable de se retrouver dans l’eau même si je la trouve froide. Je me sens légère. J’ai l’impression d’être libre et de pouvoir tout faire. Je ne sais pas, c’est indescriptible.
— Je suis content d’entendre ça. Bon alors j’ai réfléchi et regardé des vidéos pour t’aider. Ton problème c’est que tes jambes vont te mener la vie dure et ne resteront pas parallèles au bassin.
J’acquiesce.
— Bien, j’ai une solution qui semble avoir fait ses preuves. Je vais positionner un pool boy entre tes cuisses. Je te l’installe et tu pourras commencer à nager.
Il s’exécute.
— OK, tu es prête ?
— Je crois oui.
— Tu devras donner de bonnes impulsions, me conseille-t-il.
— D’accord. J’y vais.
J’ai l’impression d’être emmanchée. Aucune grâce ne se dégage de mes déplacements. Je m’étends et commence les mouvements de crawl sous le regard de Kyle qui finit par s’élancer en nageant la brasse dans le couloir bordant le mien. C’est difficile et très fatigant de nager qu’à la force des bras, j’avance, mais pas assez rapidement, ce qui m’épuise et m’irrite.
— Alors ?
— Votre système m’aide c’est indéniable, en revanche, je vais devoir muscler mes petits bras si je veux nager plus de vingt-cinq mètres, dis-je avec ironie.
— Laisse-toi le temps, c’est ta première séance et je trouve que tu t’es très bien débrouillée. Crois-moi, tu peux être fière de toi.
Après dix longueurs, la fatigue me contraint d’arrêter. Je sors à l’aide de l’élévateur, évidemment, tous les curieux qui ont envahi le bassin ne cessent de me regarder. J’offre une distraction et un spectacle aux nageurs à moi seule. Pour la seconde fois de la journée, je me retrouve à être l’attraction phare. J’aimerais leur gueuler d’arrêter de me fixer de cette façon, mais je me contiens, à quoi bon s’égosiller ? Je dois m’adapter et faire abstraction de ces personnes indiscrètes. Partout où je vais passer, j’aurai droit à cette curiosité malsaine, autant s’y habituer, même si pour le coup c’est plus difficile à dire qu’à faire. Je vais finir par ne plus les voir. Un jour…
Merci d'avoir pris le temps de me lire.
Si ce début vous a plu et que vous souhaite connaître la suite des aventures de Camden et Faith,
Black Maple est au format ebook, abonnement kindle et au format papier.
Si vous lisez mon roman sous n'importe quel format, je vous invite et surtout vous encourage à me laisser des étoiles sur amazon et si vous le coeur vous en dit, laissez-y votre ressenti. Un livre avec des évalutions permet une meilleure visibilité et donne envie à d'autres lecteurs de le découvrir.
Je vous dis à bientôt pour l'épisode 2 qui devrait sortir à la fin de l'automne.
Bisous
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